Au fait, c’est quoi une religion ?

Au fait, c’est quoi une religion ?

Une conséquence inattendue de la mondialisation

Aussi curieux que cela puisse paraître, la définition du terme « religion » soulève bien des difficultés. Le problème ne date pas d’hier.

Cicéron (106-43 av JC) a proposé deux étymologies possibles : soit relegere, qui voulait dire « rassembler », soit religere voulant plutôt dire « revenir sur ce qu’on a fait, se recueillir ». Pourtant quelques siècles plus tard, les écrivains et philosophes chrétiens Tertullien (qui vécut entre 150 – date approximative – et 220 ap JC) et Lactance (250-325 ap JC) ont donné comme étymologie pour le mot religion le religare latin qui voulait dire « relier », du fait du lien avec Dieu.

Cela nous indique plusieurs choses. Tout d’abord, déjà dans l’Antiquité le terme de religion recouvrait des réalités fort différentes et son origine était obscure.

Influence du christianisme en Occident

Ensuite, l’irruption du christianisme s’est accompagnée d’une redéfinition de la religion. Ceci n’est en rien péjoratif, le processus de redéfinition est courant en matière scientifique ou dans le domaine philosophique, lorsque l’on acquiert une vision plus précise des choses dont on s’occupe. Mais c’est un fait, le concept de religion a été précisé à la lumière de l’expérience chrétienne, et c’est sous cette forme qu’il est entré dans nos dictionnaires après avoir été consacré par l’usage.

Dans le christianisme en effet, l’accent est mis sur la relation à Dieu. Celui-ci s’est révélé par les Écritures, et l’on s’adresse à lui dans la prière ou lors de cérémonies. Il est donc naturel que l’on ait préféré l’étymologie – même tardive – de « relier ». La question n’est d’ailleurs pas de savoir si cette interprétation est pertinente ou non car de toute façon, la longue suprématie du christianisme comme religion dans les pays européens a établi une sorte d’équivalence entre religion et relation à Dieu. L’islam concurrent dans le bassin méditerranéen n’a en rien changé cette définition. De sorte que dans l’usage courant le mot religion, marqué par notre histoire, a une signification évidente : il s’agit d’un lien particulier avec le Créateur, et de toutes les formes que peut prendre ce lien. Le judaïsme qui a précédé le christianisme procède lui aussi de cette conception. En ce sens les « religions du Livre » ont une définition simple et claire de ce qu’elles sont en tant que religions, et ont associé le terme de religion à ce qu’elles sont.

Que deviennent alors les religions des Grecs, des romains ou des gaulois ? Et que deviennent l’hindouisme, le bouddhisme, le taoïsme et bien d’autres ?

Les religions orientales sont-elles des religions ?

Il n’y a pas si longtemps les dictionnaires français définissaient le bouddhisme par exemple non comme une religion mais comme une philosophie. […]

Deux définitions pour le phénomène religieux

Certes, on pourrait tenter de réconcilier les différentes approches en définissant le bouddhisme, pour reprendre cet exemple, non comme une religion mais comme une philosophie religieuse. Ce ne serait pas faux, car le Bouddha n’avait d’autres prétentions que d’avoir compris certaines choses et de tenter de les transmettre. Il n’avait recours ni au concept de révélation venue d’en haut, ni à la distinction entre foi et raison si importante dans le christianisme ou dans l’islam. Le salut qu’il proposait passait par l’étude et la compréhension. Il est en réalité plus proche de Pythagore son contemporain, des philosophes présocratiques ou de Platon que de Jésus ou du prophète Mahomet.

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